Niveau : pour débutant
Cette série d’articles tente de donner un aperçu succinct de la notion d’art en occident. Depuis sa création jusqu’à aujourd’hui. Dans le but de donner des clefs de lecture sur l’art en général et de comprendre où nous en sommes aujourd’hui.
16e – 17e siècle : L’art au service des rois et de la propagande religieuse. L’art décrit le quotidien.
Faut-il faire de l’art une recherche absolue du beau ? Faut-il mettre ce beau au service d’un message ? Faut-il illustrer un discours, décorer ou montrer la vie quotidienne (profane) ? Ce débat a traversé toutes les époques de la production artistique jusqu’à aujourd’hui.
Au 16e et 17e siècle l’art continue à se développer et se met au service de l’église et des rois en jouant avec l’influence de l’antiquité. Ce faisant, Le Titien, Le Caravage, Ribéra, Velazquez ou Georges de la Tour imposent des visions esthétiques fortes, le clair-obscur et les jeux de lumières. Ils en feront aussi des genres : mythologique, paysage, nature morte, nu, pittoresque, décoratif… Et des styles : le maniérisme, le baroque et le classicisme… Notez que parfois les catégories et les appellations de styles sont postérieures, cela est dû au travail des historiens d’art. Le baroque apparaît comme péjoratif à la fin du triomphe de ce mode d’expression correspondant à un programme public de décor total (Le Bernin en Italie, Matthias Braun à Prague). Le classicisme est un autre idéal du beau inspiré par l’antiquité (Nicolas Poussin), mariant l’allégorie et les codes corporels.
Titien, « Vénus d’Urbin », 1538, huile sur toile, 108 x 175 cm, Les Offices, Florence.
Jusepe De Ribera, « Saint-Sebastien, Sainte-Irène et Sainte Lucie » 1628-1630
Georges de La Tour « Le Nouveau-né » (1640)
Le Caravage, « Judith décapitant Holopherne » (vers 1598), Galleria Nazionale d’Arte Antica, Rome, Italie.
D’un côté, nous avons l’espace public dans lequel se montre le pouvoir qui passe par la reprise de traditions architecturales anciennes telles que babylonienne, égyptienne ou encore le complexe d’Angkor au Cambodge. Cette architecture célèbre le pouvoir politique et religieux au quotidien à travers les monuments, dont l’un des plus emblématiques est le château de Versailles. Il apparaît clairement que l’Europe s’inspire de l’antiquité pour promouvoir un modèle de propagande monumentale et universelle (Propagande est un terme d’origine religieuse, que la révolution française reprendra dans le sens de propager des idées politiques). A sa manière, l’art reprend ces modèles de traditions anciennes pour en faire une version en grand format qui se perpétuera jusqu’aujourd’hui avec le développement des villes qui se fait parfois avec une emphase totalitaire. Nous retrouvons cette influence au 20e siècle dans la statuaire publique du dirigeant, de Mussolini à Staline ou Mao, en version monumentale comme affirmation constante du politique.
Temple d’Angkor
Place Saint-Pierre, Vatican
Vatican, intérieur
Versailles, Galerie des Glaces
D’autre part, il y a l’espace privé de la société aisée. Elle favorise le développement du portrait (Léonard de Vinci, Rembrandt, Elisabeth Vigée Lebrun), des paysages et des natures mortes qui sont souvent des méditations sur la précarité de l’existence : les “vanités” ( Philippe de Champaigne, Chardin) est un genre dont l’implication philosophique met en exergue le triomphe de la mort.
Jean-Baptiste Siméon Chardin, « La Raie », 1728, huile sur toile, 114 × 146 cm, Musée du Louvre
Philippe de Champaigne, « Vanité »
(Portrait à gauche) Elisabeth Louise Vigée-Lebrun, « Portrait de Madame Lesould », 1780. (Portrait à droite) Rembrandt, « Nicolaes Ruts », bois, 116 x 87 cm, New York.
Rembrandt, « Portrait de Herman Doomer », Huile sur panneau
Arcimboldo, Rubens, prennent le portrait officiel de commande comme un exercice de virtuosité. Goya y apporte une vision sarcastique. En revanche, Le Gréco reste dans la peinture religieuse et en fait un terrain d’expérimentation visionnaire.
Velasquez, « Les Ménines » (1656) – Prado, Madrid
Diego Velasquez. Portrait du Pape « Innocent X », 1650, Gallerie Doria-Pamphili, Rome
Giuseppe Arcimboldo, « Vertumne » (portrait de Rodolphe II)
Le Greco, Vue de Tolède, 1599
Le 18e siècle verra apparaître la notion d’esthétique (Alexander Baumgarten, Aesthetica, 1750) et la critique : l’art affirme la personnalité de l’artiste.
Dans le prochain article vous verrez pourquoi l’art rompt avec les sujets officiels à l’approche de l’industrialisation.
L’invention de l’art en Europe 1/8.
15e siècle : L’art s’invente à la renaissance. L’oeuvre d’art n’a pas de fonction, elle n’est là que pour la délectation esthétique.
L’invention de l’art en Europe 3/8.
19e siècle : Au début de l’industrialisation, l’art rompt avec les sujets officiels et fait place à la nostalgie du passé et de la nature
L’invention de l’art en Europe 4/8.
Fin du 19e siècle : Cadrer l’insignifiant quotidien et transposer la lumière en matière picturale
Article inspirée de « Image, une histoire mondiale » de Laurent Gervereau, dont je recommande la lecture.